Summary: | Nous présentons dans ce travail les éléments qui permettent de constituer à nos yeux la spécificité de la catégorie de « réfugié ». Nous nous basons pour cela sur la monographie de deux camps de réfugiés. Le premier est le camp de Dadaab, qui se situe au Kenya et accueille en grande majorité des réfugiés somaliens. Des Ethiopiens, des Erythréens, des Soudanais et des personnes d’autres nationalités y ont également trouvé refuge. Le deuxième camp est le camp de Nkondo, en République Démocratique du Congo et héberge des personnes ayant fui l’Angola au moment de la reprise des combats en 1998 dans les provinces du Zaïre et de Uige. Tous deux sont gérés par le H.C.R. Nous avons complété ces études par une analyse du processus de rapatriement des réfugiés angolais qui a commencé en juin 2003 pour se terminer officiellement le 27 mars 2007. Le camp constitue un territoire particulier. Ni ville, ni lieu d’enfermement, il se définit par les pratiques des agents sociaux qui y sont à l’œuvre, c’est-à-dire les réfugiés et les agents des agences humanitaires. Deux dimensions permettent de l’appréhender plus justement : sa temporalité spécifique, c’est-à-dire perçue différemment en fonction du statut de la personne, et sa transterritorialité multiscalaire, nous entendons par là le fait que les agents agissant dans le camp représentent des échelles territoriales différentes. Le territoire du camp permet de définir la catégorie de « réfugié » telle qu’elle est utilisée non seulement par les personnes appartenant à cette catégorie mais aussi par les employés des agences humanitaires. La manière dont cette population est ensuite découpée en groupes pour en faciliter la gestion participe aussi de son interprétation par les acteurs sociaux. Par ailleurs, les documents issus autour de cette catégorie de « réfugié » et qui en prouvent l’appartenance contribuent à former cette catégorie. Ainsi, non seulement cette dernière a une validité « anthropologique », pourrait-on dire, mais également légale puisque les papiers prouvant le passage dans un camp géré par le H.C.R. et délivrés par les agences d’aide permettent d’accéder à des identités parfaitement légales sur le plan juridique. Les observations effectuées autour de la frontière, au moment du rapatriement des réfugiés angolais mais également au cours de la vie quotidienne dans le camp, renforcent l’idée d’une construction de la catégorie de « réfugié » non seulement sur un emplacement précis mais aussi lors du/des déplacement/s.
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